Point du jour au mercredi
13 août 2003
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Le « Table start »
Position à 14H40 (Paris) : 11° 06 S / 83° 17
W
La nuit vient de se passer sans encombre, pas de filet, pas
de chalutier, juste la mer tout autour et dessous et le
ciel au-dessus. Comme ça on n’est pas dérangé par
le voisin d’en face qui regarde le match de foot
avec son sonotone et la fenêtre grande ouverte, des
fois qu’on raterait le but du siècle !
L’analyse de la météo
immédiate
au petit matin est rapide (pareil qu’hier, ciel nuageux,
vent 12 nœuds environ), pas besoin de changer de
voile. Quant à l’évaluation de la température
de l’eau de mer Raphaëla nous annonce « environ
19,5°C » et le capteur relié à la
balise Argos qui nous permet de savoir non seulement la position
de la planche mais aussi la température de l’eau
annonce 19,7°C.
Et Raphaëla nous informe : « Vous
savez avec mon expérience de vétérinaire
en aquaculture j’ai une très bonne idée
de la température de l’eau rien qu’en
trempant la main dedans ».
Quand on pense qu’il
y a des gens qui consacrent leur vie professionnelle à fiabiliser
les thermomètres on devrait leur présenter
Raphaëla, ils iraient à la plage plus souvent…
Il n’empêche l’eau est encore bien fraîche
pour envisager une toilette sérieuse ainsi qu’un
peu de ménage à bord. Les lingettes humides
font très bien l’affaire et les cheveux attendront
encore un peu, de toute façon elle ne les voient pas…
Le petit déjeuner a été interrompu
pour changer la cartouche de gaz, une semaine de fonctionnement
c’est ce qui avait été mesuré par
l’un de nos amis lors des précédentes
traversées. Il avait fait bouillir des casseroles
d’eau successives pendant une bonne après-midi.
Précis,
scientifique, sans faille !
Nous lui transmettons les félicitations
de Guy sur la rectitude de sa route. Elle ne prend pas le
temps de goûter
le compliment et nous explique que « si c’est
droit c’est parce que je bosse en permanence, le pied
sur la barre continuellement pour redresser à chaque
passage de vague ».
Mais hier la navigation s’est
plutôt bien passée, il y avait régulièrement
des risées à 15 nœuds surtout au sommet
des vagues. Elle devait être vigilante pour ne pas
se faire embarquer.
Et puis elle ne cesse de progresser sur
la technique de gréage, avec un objectif simple :
produire les efforts minimaux pour un résultat donné.
C’est
une philosophie de vie que je trouve tout à fait saine,
pas vous ?
D’abord elle a résolu la question
de la délicate
fixation de la tête de voile tout à l’avant
de la planche qui l’obligeait à quasiment ramper
pour atteindre l’œilleton à son extrémité et
attacher la voile. Grâce à un système
de drisse que Guy lui a installé tout le long de la
coque elle « hisse » horizontalement
la tête
de la voile vers le nez de la planche, comme on le ferait
pour une grand-voile.
Et aujourd’hui elle arrive à gréer
sa voile en 20 mn, sacré progrès par rapport à l’Atlantique !
Ensuite l’étape qui consiste à relever
la voile pour attaquer la navigation est aussi un moment
périlleux.
Vous avez dû tous essayer de relever
au tire-veille la voile d’une planche dans des creux
monstrueux de 50 cm, pas facile, hein ? On goûte
l’eau
plus vite qu’on le pense !
Alors Raphaëla vient de lancer un concept révolutionnaire,
le « table start ».
Elle relève
la voile progressivement en faisant glisser le mât
le long de la planche. Elle reste assise et elle empoigne
ensuite le
wishbone pour amener la voile sur la planche, puis elle la
positionne en démarrage de navigation et elle se laisse
soulever avec le vent.
Et hop, le tour est joué, en
toute sécurité et sans trop se fatiguer.
Guy nous l’a toujours dit : « Le
secret du marin c’est la patience et la ruse ! ».
Raphaëla
s’attache à appliquer cette philosophie au pied
de la lettre : « Je passe mes journées à réfléchir à être
paresseuse », nous a-t-elle confié.
Je
dirais plutôt efficace, paresseux c’est le mot
des gens qui n’ont pas encore trouvé le moyen
d’être
efficace…
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