Point du jour au vendredi
8 août 2003
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Le jour J (et ceux
d’après)
Le matin du jour J (mardi 5 août 2003)
c’est
la même chose que le jour d’avant, je parle de
la météo bien sûr, en un peu plus brumeux
peut-être…
Raphaëla ne le sait pas encore mais
tout le personnel du « Departamento Nautico » est à pied
d’œuvre dès 7H00 (je précise que
d’habitude tout commence à bruisser à 9H00)
sur ordre de la direction du Club de Regatas qui a décidé de
faire les choses en grand pour Raphaëla.
Nous arrivons
sur place à 7H30, Guy est sur le pont depuis 6H00
(je ne vous présente plus Guy) et Gabriella est une
nouvelle fois au téléphone pour l’accueil
des agents de la douane qui doivent venir valider les conditions
du départ.
Je suis sûre que cela rappelle des
souvenirs à quelques
uns… Parce qu’il y a une chose qu’on a
soigneusement passée sous silence tant que Raphaëla
n’était pas partie, c’est la question
TRES IMPORTANTE de la validation de son départ par
la Capitainerie du Port de Callao (Les Affaires Maritimes
péruviennes).
Cette histoire a duré au moins
une semaine et nous avons fait d’incroyables contorsions
pour trouver le moyen, naturel bien entendu, d’éloigner
Raphaëla du Club chaque fois que les inspecteurs se
manifestaient pour une visite détaillée de
la planche. En fait c’est Guy et Gaby, encore eux,
qui se sont tapés le sale boulot. Et moi j’avais
pour mission d’emmener Raphaëla à droite à gauche,
tous les prétextes étaient bons, quand le rendez-vous
se précisait au club. Pas facile, surtout qu’on
a tous beaucoup fonctionné ensemble !
Imaginez la situation : une semaine
pour dédouaner
la planche et puis se pose le problème de la sortie
du territoire de Raphaëla, le club de Regatas n’étant
pas un poste frontière aux dernières nouvelles.
Ce
point avait déjà un peu semé la perturbation
dans l’équipe, Raphaëla était agacée
de toutes ces procédures mais nous nous savions qu’elles étaient
absolument nécessaires. C’est comme ça
que Gaby et moi nous sommes retrouvées au fin fond
du Port de Callao pour trouver la personne habilitée à tamponner
le passeport de Raphaëla la veille de son départ.
Et là-dessus la Capitainerie du Port qui commence à s’agiter
en émettant des doutes sur la capacité de la
planche à faire cette traversée (même
si personne n’avait encore vu l’engin).
Nous nous sommes entendus très vite :
pas un mot à Raphaëla
sinon c’est les stress qui pointe à 10 (elle
ne sait toujours rien, nous lui raconterons tout ça à Tahiti).
Et là, encore une fois Gaby a été impériale.
Car c’est elle qui a géré ce point délicat,
les rendez-vous, les susceptibilités éventuelles
des intervenants, et ils étaient nombreux !
Or donc ce matin-là il y a deux
mondes : celui de Raphaëla, concentrée sur
les derniers préparatifs
du départ, je fais chauffer les nouilles pour le repas
du premier jour, je prépare du thé. Et puis
l’autre monde, celui des inspecteurs qui arrivent en
masse, qui veulent voir la planche - pourvu qu’ils
ne demandent pas de la vider - et qui ont des tas de
papiers que Raphaëla doit signer avant de partir.
Je
suis chargée de faire passer la pilule, elle passe
aussi bien que le pisco sour des premiers jours, ouf ! Tout
est bien, elle peut partir.
Pendant ce temps Raphaëla assise sur
sa planche parle avec les journalistes et les visiteurs qui
sont venus lui
dire au revoir.
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Raphaëla échange les derniers
mots avec les visteurs et les journalistes le matin
du 5 août.
Photo Odyssée du vent 2003
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Carlos Caravedo, l’homme qui est
parti de Lima 38 ans auparavant sur son embarcation
type Kon-Tiki est à ses côtés, on le
sent heureux.
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Raphaëla et Carlos Caravedo assis
sur la planche avant la mise à l'eau.
Photo Odyssée du vent 2003
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Une dernière embrassade et la planche
est emportée
pour la mise à l’eau.
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Dernière embrassade de l'aventurier
de 1965.
Photo Odyssée du vent 2003
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Pendant ce temps l’équipe
saute à bord
du zodiac qui doit les conduire au magnifique 46 pieds carbone
du Président de l’association de voile péruvienne
et qui doit faire l’accompagnement la première
nuit.
La planche se retrouve rapidement entourée d’embarcations
de pêcheurs, de vedettes et des petits voiliers dériveurs
que les élèves de l’école de voile
du club ont gréé spécialement.
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Départ de Raphaëla le
5 août 2003.
Photo Odyssée du vent 2003
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Derniers regards échangés
entre l’équipe
et Raphaëla, dernières embrassades et hop le
zodiac fonce vers le grand voilier. Raphaëla franchit
la ligne de départ à 10H07, au bout d’un
quart d’heure Gaby commence à jaunir, je suis
encore vaillante et je lui sors tout de suite le mer calme
(2 comprimés ça devrait aller). Elle disparaît
dans le fin fond du bateau, on ne la reverra plus avant le
lendemain.
L’après-midi se passe, les creux se précisent
nettement, j’ai déjà flanché,
je suis étalée sur le pont la tête tournée
vers le ciel et, en l’absence de Gaby, c’est
moi qui tente de faire l’interprète avec l’équipage
du bateau qui connaît autant d’anglais que je
connais de russe… C’est pas grave ça marche
quand-même.
Le bateau passe sa nuit à faire des ronds dans l’eau à côté de
Raphaëla, il y a longtemps que je ne dis plus rien.
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Jimmy et Jorge à la barre du
Hawk qui a fait la veille de la première nuit.
Photo Odyssée du vent 2003
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Le lendemain matin,
brume, comme d’habitude, Raphaëla
a le cœur à l’envers, comme d’habitude,
mais Guy est présent, rassurant – prends ton
temps, ne t’use pas, il n’y a pas beaucoup de
vent pour le moment, attends-le et essaie de manger pendant
ce temps.
A 8H00 nous rebroussons chemin, Guy et moi suivons la planche
des yeux jusqu’à ce qu’elle ne soit qu’un
point à l’horizon. Je me renfonce dans mon duvet
sur le cockpit et je ferme les yeux, finalement je m’endors…
On rentre au Port de Callao, Guy prépare
les nouilles pour tout le monde. Je choisis le pâté Hénaff
du Pérou, ras le bol des nouilles presque tous les
jours ! Je n’irai pas jusqu’au coup de rouge
quand-même.
Le lendemain Guy et moi attaquons notre
traversée
du Golfe du Mexique puis de l’Atlantique. Presque 24H00
de voyage pour arriver à Paris avec nos chaussettes,
nos polaires, nos doudounes… c’est la claque à Roissy !
Heureusement Edith et Fred étaient sur le pont pour
nous accueillir et nous donner des bonnes nouvelles :
vous avez de la chance il y a de l’air aujourd’hui
(ah bon) et puis il fait beaucoup moins chaud que la semaine
dernière. On l’a échappé belle !
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