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Point du jour au lundi
22 septembre 2003 (Paris)
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Vertigo
Position à 5H30 (Paris) : 10°
08 S / 119° 45 W
Pierre, le frère de Raphaëla,
est avec nous au PC vendredi après-midi, "Bon,
Raphaëla, tu es du bon côté de la colline
maintenant".
C'est vrai mai elle veut garder la tête froide,
ne surtout pas s'emballer, "le chemin à faire
est encore long, ne pêchons pas par excès d'optimisme"
(elle se répète, là)…).
"Mais j'emmagasine plein de souvenirs sympas de navigation.
J'avais une frustration par rapport à l'Atlantique.
Maintenant je sais que c'est possible d'avoir plein de plaisir
de navigation".
Pierre est rassuré par le ton de sa voix, il la
sent plus sereine que la dernière fois qu'il lui avait
parlé, c'était le week-end du 15 août.
"Oui, mais à ce moment-là c'était
encore les début de la traversée".
Maintenant elle est dans le grand désert bleus
avec tout juste quelques poissons volants pour l'accompagner.
"Je me demande bien pourquoi ils continuent de voler,
ils n'ont plus de prédateurs", vous voyez,
un esprit scientifique ça n'arrête jamais de
cogiter.
"D'ailleurs de temps en temps je me dis que j'aimerais
bien voir une loupiote le soir, pour le moment je me contente
d'un dialogue avec les étoiles."
Raphaëla, souviens-toi, la dernière fois
que l'as croisée la petite loupiote tu t'es fait pêcher…
Le physique est surveillé et géré
de très près, "j'applique le système
de Pierre-Yves Guillemot et Hélène Chevreuil,
je les enveloppe (les pieds) dans la journée
et le soir c'est Biafine et massages".
De toute façon il faut que Raphaël soit en
mer pour daigner s'occuper de sa "vieille carcasse".
La journée de vendredi a été
"bizarre. Il y avait de gros nuages le matin et je
me suis pris une grosse averse. J'ai été obligée
de m'abriter sous la voile". La journée tropicale,
quoi…"
"La température de l'air est à 25°C
mais le soir je n'ai pas très chaud il me faut un tee-shirt,
voire une petite laine. Je me suis fait un dîner en
musique mais alors ces écouteurs dans les oreilles
c'est vraiment de la merde, ça tombe tout le temps
dans mon riz et puis ça fait mal".
Guy avait bien essayé de réfléchir
à une installation de son type Opéra Bastille
mais finalement ses calculs lui ont montré que le volume
de la "salle" n'était pas en rapport avec
la taille des enceintes…
Samedi après-midi ce sont les retrouvailles
avec Gabriela la responsable administrative de l'équipe
sans qui le départ du Pérou n'aurait tout simplement
pas eu lieu.
"Ola, Raphaëla tu sais que tu as des fans partout
au Pérou et en Argentine".
Vous vous souvenez du Bouillon Kub, le nirvana gustatif
de Raphaëla au début de la traversée, eh
bien c'était une idée de Gabriela !
- "Et les anatifes, Raphaëla, tu les cuisines ?".
- "Non, je les ai broyés de rage et j'en ai
fait de la purée !".
Hier, la journée a été
"hyper sereine, la mer gentille et le vent sympa.
J'ai navigué sans m'en rendre compte (on rêve…)
j'ai oublié les heures. Du coup je me suis mise à
réfléchir (c'eût été
bien étonnant qu'elle ne le fît point) au
sens de la vie, à ce que je vais faire après
(aïe, aïe, aïe, qu'est ce qu'elle nous
prépare ?) à ce qu'on va devenir…".
On interrompt la conversation, "la dérive
déconne là, il faut que j'intervienne, je te
rappelle".
Dimanche après-midi c'est vacation
avec tous les copains de Pénestin et d'Allemagne (non…
ils ne sont quand même pas venus exprès) chez
Philippe et Ariane.
Le déjeuner s'est prolongé tardivement il y
a quelques voix un peu allumées, la joyeuse ambiance
de Pénestin, quoi…
Nous sommes par terre, debout autour du téléphone,
les enfants courent un peu partout, Philippe s'est attaqué
à la vaisselle. La voix de Raphaëla n'est pas
toujours très audible, peu importe chacun fait son
commentaire. Ariane est très inquiète "Raphaëla,
j'ai ta veste de quart mais si tu rentres trop tôt je
n'aurai pas le temps de m'en servir, ici c'est encore l'été…".
Le petit Jules qui criait partout il y a 5 minutes
est soudain muet au téléphone.
"Allo, Jules, tu m'entends ?"
"….. est-ce que tu as vu des cachalots ?"
Il est rouge et très sérieux, finalement il
embrasse le téléphone et repart en courant.
Jana n'est guère plus courageuse, elle lui explique
quand même qu'elle est en tain d'apprendre les longitudes
et les latitudes. Anne a sablé le champagne à
la mi-parcours "Ah, ben c'est bien ça !
Parce qu'au PC à Paris ils ont rien fait !".
Merde, on est en train de se faire engueuler…
On s'embrasse, Raphaëla raccroche et on va siroter un
café dans le jardin.
Pendant ce temps Raphaëla se prépare
à naviguer, elle sort de la bulle, la referme comme
toujours, et … paf l'une des poignées lui reste
dans les mains. Elle n'a rien sur elle ou presque, la seule
chose accessible ce sont 5 litres d'eau…
"J'avais des sueurs froides, c'est la plus grosse
peur de la traversée !".
Et puis aucun outil accessible sauf le poignard d'Anne Henri,
mais il était trop gros.
"Finalement j'ai passé un petit bout dans
le trou prévu pour le cadenas et en tirant, la poignée
a fini par lâcher prise de l'intérieur".
Heureusement que l'autre poignée n'était
pas fermée…
No comment sur ces panneaux qui nous avaient déjà
fait trembler sur l'Atlantique.
"Je m'imaginais déjà dans le panneau
avant en train de défoncer le cloisons pour accéder
à l'arrière. Du coup j'ai passé la journée
à ruminer avec un petit vent de 5 à 10 nœuds
chiant".
A partir d'aujourd'hui c'est pince, marteau, tournevis
dans le panneau central et Guy explique à Raphaëla
comment, de l'extérieur, faire sauter la rondelle qui
retient la poignée de l'intérieur. De toute
façon, des poignées de rechange elle en a des
brassées.
L'incident est clos, j'ai très chaud tout à
coup, pourtant il est 6H00 et c'est le 1er jour de l'automne…
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Crédit photos : Odyssée
du vent 2003 |
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